Le ménage sans plastique

Des tâches ménagères sans plastique, c’est possible ?


Accessoires et produits de nettoyage, électroménager, sacs poubelle… Quand il s‘agit des tâches ménagères, le plastique est partout ou presque. Bien qu’utile, cette matière pose de nombreux problèmes au niveau environnemental mais aussi sanitaire. Peut-on s’en passer pour faire le ménage ? Existe-t-il des alternatives écologiques ? Autant de questions auxquelles cet article va tenter de répondre…

Le plastique, toute une Histoire

Faire chauffer une matière et la mouler pour créer un objet est une méthode utilisée depuis des milliers d’années. Les Mayas, les Olmèques et les Aztèques fabriquaient déjà des balles en caoutchouc à partir du latex extrait d’un arbre : le Castilla elastica.

Les premiers plastiques artificiels font leur apparition au XIXe siècle : la parkésine, à base de cellulose de végétaux (présentée à l’Exposition Internationale de Londres en 1862) et le celluloïd en 1870 (très inflammable donc rarement utilisé aujourd’hui). Mais la majorité des plastiques sont créés au XXe siècle : pour plus de détails, consultez l’article "L’histoire du plastique en 15 dates clé" de la société Carbiolice, publié le 22 juillet 2020.

Après la seconde guerre mondiale, le plastique entre progressivement dans tous les foyers. Ce sont les Trente Glorieuses, une période de forte croissance alliant progrès technologiques et généralisation de la production industrielle. Malléable à souhait et bon marché, le plastique permet de créer des objets pratiques, résistants, esthétiques et toujours plus variés. Il devient donc un matériau pratiquement incontournable.

Plus tard, la “chimie verte” donne naissance aux bioplastiques. Le premier d’entre eux est le rilsan (ou polyamide 11), fabriqué dès 1947, à partir d’huile de ricin. Les autres bioplastiques apparaissent à partir des années 90 : le PLA, à base d’amidon (maïs) ou de glucose (betterave, canne à sucre), l’amidon plastifié (amidon associé à un plastifiant), les PHAs (PHB, PHBV, PHBH…), fabriqués grâce à des bactéries, le PBAT, issu de la pétrochimie, mais aussi le Bio-PET, le PBS, le PE, le PEF, le PP…

Mais c’est quoi exactement le plastique ?

À l’exception du silicone (une réaction entre du silicium et du chlorure de méthyle), la plupart des plastiques synthétiques sont fabriqués à partir de pétrole. En distillant cet hydrocarbure, on récupère un liquide transparent, du naphta, qui est chauffé dans un four avec de la vapeur d’eau afin d’obtenir des monomères. Avec des produits chimiques, ces molécules sont ensuite assemblées de manières différentes pour former toutes sortes de polymères : les matières premières des plastiques. En plus d’utiliser une énergie fossile, cette opération est à la fois énergivore et polluante.

  • puce Pour en savoir plus, consultez la vidéo dédiée de l’émission C’est pas sorcier : ""Chimie verte, des végétaux pour remplacer le pétrole"

  • De son côté, le terme “bioplastique” englobe des plastiques très différents : biodégradables (mais issus de ressources fossiles), totalement ou partiellement fabriqués à partir de matières premières renouvelables, d’origines animales ou végétales (mais pas biodégradables) ou les deux. Mais ces deux conditions ne sont que rarement réunies. Seulement 41 % des bioplastiques produits dans le monde en 2021 étaient “des matières plastiques biosourcées et biodégradables” (consulter le rapport de l’ANSES)

    Dire qu’ils sont biodégradables est aussi une notion relative. Pour se dégrader complètement, le bioplastique doit passer de l’état solide à celui de molécules, ce qui se fait en 3 étapes :
  • puce la fragmentation : “morceaux” de plastique
  • puce la dégradation : forte réduction des masses moléculaires
  • puce l’assimilation et la minéralisation : résidus intégrés par les microorganismes et transformés en biomasse, en eau, en dioxyde de carbone ou en méthane.


À l’heure actuelle, nombre de bioplastiques ne sont biodégradables qu’en passant par un compostage industriel (PLA, PBAT…). Seuls les bioplastiques 100 % d’origine animale ou végétale, comme les PHA, peuvent être compostés chez soi, si les conditions sont réunies (microorganismes, taux d’humidité, température, pH…). Certains sacs plastiques sont ainsi compostables en seulement 6 mois.

Même si la science ne cesse de progresser et d’améliorer la qualité du bioplastique, cela reste un matériau assez cher, fragile et dont la dégradation doit encore être perfectionnée (résidus, toxicité…). Le plastique “traditionnel” est donc largement majoritaire dans la production industrielle, bien qu’il soit devenu un véritable fléau…

Pourquoi vaudrait-il mieux s’en passer ?

Tout d’abord, la prise en charge des déchets plastiques est largement insuffisante à l’échelle mondiale. Selon ce rapport de l’OCDE, ils sont mal collectés (22 % rejetés dans l’environnement en 2019) et peu recyclés (9 % en 2019). Dans le même temps, la production de plastique a doublé en 20 ans.

L’autre souci est le traitement de ces déchets. Le plastique peut être incinéré (avec ou sans traitement de la fumée qui est toxique), enfoui sous terre, entassé dans des décharges ou se retrouver en pleine nature : dans les sols, les rivières et la mer. On parle d’un “7ème continent de plastique” dans l’océan Pacifique mais ce sont en réalité près de 270 000 tonnes de plastique qui dérivent au gré des courants (dont des micro plastiques, presque impossibles à récupérer). Un véritable problème quand on sait que la durée de vie du plastique peut atteindre 1 000 ans !

Enfin, certains composants du plastique s’avèrent dangereux pour la santé. Les plus connus sont le bisphénol A, que l’on trouve dans la vaisselle et les bouteilles réutilisables, les équipements sportifs, les CD et les DVD en polycarbonate, ainsi que les phtalates, des plastifiants notamment présents dans le PVC. Ce sont deux perturbateurs endocriniens, c’est-à-dire qu’ils altèrent la capacité à se reproduire (fertilité et développement du fœtus)…

Il n’est malheureusement pas possible pour l’instant d’abandonner le plastique ni de le remplacer par des bioplastiques 100 % sains et écologiques. Par contre, on peut en diminuer fortement l’utilisation, notamment pour les tâches ménagères.

Utiliser le moins de plastique possible

Comme le répètent les adeptes du zéro déchet, “Le meilleur déchet, c’est celui qui n’existe pas”. Pour aller dans ce sens, vous pouvez déjà commencer par réduire drastiquement votre consommation de plastique :

Espacer vos achats : pour votre électroménager et vos accessoires de ménage, n’hésitez pas à choisir la qualité ou des marques réputées pour leur solidité (garanties de longues durées, fabrication “à l’ancienne”...). Privilégiez des appareils électriques performants et économes en énergie afin de ne pas être tenté·e d’en changer à court terme. Vous pouvez aussi vous procurer des éponges lavables plutôt que jetables.

Acheter d’occasion : de nombreuses enseignes proposent des articles de seconde main, vérifiés, réparés si besoin et reconditionnés. Comme pour le neuf, ces produits disposent d’une garantie et d’un service après-vente.

Réparer : avant de déposer un appareil en déchetterie ou de le ramener en magasin pour en acheter un autre, mieux vaut le réparer ou le faire réparer (ateliers associatifs, réparateurs…). Pour vous aider, certains appareils électriques et électroniques ont un indice de réparabilité depuis le 1er janvier 2021 : une note sur 10, visible à l’achat. Il vous permet de savoir si un aspirateur, un lave-vaisselle, une machine à laver ou un sèche-linge peut facilement être réparé ou non : indicereparabilite.fr.

Choisir du recyclé : certains appareils, objets et produits ménagers sont fabriqués ou emballés avec du plastique et d’autres matériaux recyclés. On connaît déjà les bouteilles et flacons en plastique recyclé mais il existe aussi des éponges avec un grattoir plus durable, fait avec des bouteilles en plastique recyclées et de la poudre de coques de noix et de noisettes. En définitive, l’idéal est d’opter pour du 100 % recyclé mais mieux vaut une partie de matières recyclées que pas du tout.

Le rechargeable : au quotidien, essayez de bannir les produits ménagers jetables. Vous pouvez utiliser des recettes de nettoyage maison, à verser dans un vaporisateur (si possible avec un réservoir en verre). Des marques proposent aussi des contenants (bouteilles, flacons, vaporisateurs…) à remplir une fois vides. Les poudres et les pastilles à diluer sont une bonne option. C’est moins vrai pour les recharges souples (de lessives, de savons liquides…). Si elles permettent d’économiser environ 70 % de plastique, elles ne sont pas recyclables pour le moment à cause des plastiques qui les composent. Mieux vaut donc s’abstenir pour l’instant ?

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Remplacer le plastique par d’autres matières

Hormis pour l’électroménager où il est omniprésent, vous avez la possibilité d’aller encore plus loin en vous passant purement et simplement du plastique. Cela concerne tout particulièrement les produits ménagers et les accessoires.

Les emballages : l’idéal est d’opter pour du carton ou du papier, si possible 100 % recyclés. Pour que tous vos produits ménagers soient emballés de cette façon, la seule solution est de les choisir sous forme solide. Il y a d’abord les savons : “classiques” (d’Alep, de Marseille…), savon noir, “solide vaisselle” (au lieu du liquide vaisselle), savons multi-usages ou détachants… Vos produits peuvent également être en poudre, en pastilles ou en tablettes : bicarbonate/cristaux de soude, Terre de Sommières, lessive en poudre, poudres ou tablettes effervescentes à dissoudre dans de l’eau pour nettoyants multi-surfaces, pour les vitres, les WC…

Pour aller plus loin :


Les contenants : dans votre cuisine, le verre peut souvent se substituer au plastique : plats (de cuisson, saladiers…), bocaux, boîtes alimentaires, bouteilles, carafes, doseurs, biberons, verres… Évitez cependant les verres industriels décorés car leurs peintures contiennent parfois deux substances toxiques : du plomb et du cadmium. Des produits de nettoyage sont aussi vendus dans des bouteilles en verre avec des bouchons en aluminium (liquide vaisselle, vinaigre blanc, savon noir, nettoyants pour le sol, multi-usages…). Il existe même des recharges compostables pour les remplir. À noter que le verre et l’aluminium sont recyclables et réutilisables à l’infini !

L’éponge : deux options s’offrent à vous. Il y a les éponges 100 % végétales, avec un côté absorbant à base de cellulose (de bois ou de coton) et un côté grattant fait de coques de noix, de noisettes et/ou de noyaux de fruits concassés. Il y a aussi l’éponge tawashi, une éponge réutilisable d’origine japonaise, lavable en machine, généralement tissée à la main avec du ou des tissus récupérés. Une paille de fer vous permettra quant à elle de nettoyer les grilles de four et de barbecue. N’utilisez surtout pas d’éponges de mer (ou spongiaires) car cet animal est vital pour les océans.

Les sacs plastiques et poubelle : préférez les sacs en bioplastique 100 % biosourcés et biodégradables, en veillant à les conserver dans un endroit sec. Vous pourrez même les jeter dans votre compost avec vos déchets verts et alimentaires !

Des accessoires sans plastique : balai, balayette, balai-serpillière, plumeau, brosse et ventouse pour les WC peuvent avoir des manches en bois. Si c’est possible, tournez-vous vers des bois bruts (non vernis), d’essences et de fabrications locales. Évidemment, le reste ne doit pas non plus être en plastique : de la paille de riz ou de la fibre de coco pour le balai et la balayette (avec une pelle en métal), un seau en acier inoxydable ou en zinc pour le balai-serpillière, des fibres végétales pour la brosse des WC (avec un support en pierre ou en métal) et du caoutchouc naturel pour la ventouse. Le plumeau peut être en plumes d’autruche mais le must ce sont les poils en laine, à la fois lavables et antistatiques ! Associer bois et poils naturels sera aussi parfait pour les autres brosses (de dépoussiérage, à chaussure…).

Grâce à tous ces conseils, vous pourrez fortement réduire l’utilisation du plastique pour vos tâches ménagères et même le remplacer dans bien des cas. Consommer autrement est primordial mais il est tout aussi essentiel de trouver une solution globale et durable. La science doit encore progresser pour que l’impact environnemental du plastique devienne nul : les plastiques polluants devront peu à peu disparaître au profit de bioplastiques totalement écologiques.


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